Contexte
Trois présumés voleurs ont été brûlés vifs voire mangés par des habitants en colère le soir du samedi 19 octobre 2024, à l’entrée trois lampes située en commune de Karisimbi dans la partie Nord de la ville de Goma chef-lieu de la province du Nord-Kivu. Après cette justice populaire, une information a circulé sur les réseaux sociaux depuis le 20 octobre, notamment sur X, d’après laquelle cette scène aurait un rapport avec la haine anti Tutsi en RDC. Les images accompagnant cette allégation font état dudit lynchage des trois personnes avec leur moto, lynchées puis brûlées.
Pour vérifier cette allégation, nous sommes descendu sur le lieu du drame recueillir des témoignages, nous avons contacté un acteur de la société civile de Goma, ensuite nous avons parcouru certains médias locaux. Résultat: ces présumés voleurs brûlés ne sont pas identifiés comme Tutsi, et même les mobiles derrière cet acte n’ont aucun rapport avec le tribalisme.
Contenu de l’infox
« Lorsque les Tutsis congolais sont lynchés, brûlés voire mangés, la communauté internationale essaie de faire des discours équilibristes, sans pour autant définir mécanismes pour stopper cette anthropologie, qui prend l'allure d'une normalité. Aujourd'hui ces actes cruels de cannibalisme, l'anthropophagie, s'étendent à d'autres personnes non Tutsies. Les auteurs encouragés, voire intolérés et qualifiés des patriotes, des heros, élargissent leurs actes à d'autres personnes non Tutsies, particulièrement à l'Est de RDC »(sans correction ), peut-on lire sur la page X dénommée « Maisha RDC ».
Ce 23 octobre, cette publication cumule plus de 2 000 vues, 11 commentaires et 13 reposts à 14h44 heure de Goma.
Plusieurs internautes sont sceptiques face à l’information et partagent des doutes quant à ce dans les commentaires. C’est à l’instar de Sandwe Da, qui s’indigne: «Quand est ce qu' il y a eu le dernier tueri des tutsis? Menteur »(sans correction).
Mao Zigabe(lien archivé) quant à lui a démenti cette information: «Les bandits qui voulaient braquer des magasins vers 3 lampes à Goma viennent d’être attrapés et brûlés par des habitants en colère »
Des images qui sortent de leur contexte
Pour établir le vrai contexte de ces images, nous avons contacté le secrétaire technique de la coordination provinciale de la société civile Placide Nzilamba qui a confirmé qu’il y a bel et bien eu justice populaire mais pas des Tutsis, encore moins motivée par la haine anti Tutsi. « C’est un mensonge. Ceux qui ont été lynchés n’étaient pas des Tutsi, ce sont des bandits armés qui voulaient braquer un shop pour avoir l'argent. C’est un cas qui est rattaché à l’insécurité à Goma et non de tribalisme », déclare-t-il.
Eleza fact a fait une descente sur le lieu du drame. Lumumba Muyisa qui a vécu la scène s’exprime sur la manipulation de l’information autour de cet incident. « Les gens doivent cesser de manipuler les autres. C’est grave lorsqu’on attribue le lynchage de ces 3 bandits que moi j’avais vu au conflit tribalo-ethnique; c’est grave. Ces trois bandits ont été lynchés car ils voulaient braquer un shop d’Airtel Money. Ils sont venus à bord d’une moto et ont crépité deux balles, pour dire que ça n’a rien avoir leur communauté », témoigne ce citoyen.
Des médias précisent le contexte de l’incident
Certains médias locaux et nationaux, notamment 24sur24.cd, Kivu morning post, Actu7.cd sont revenus sur cette information en précisant que ces présumés voleurs ont été aperçus dans un cambriolage d’un magasin de vente des téléphones. «Trois présumés voleurs ont été brûlés vifs la soirée du samedi 19 octobre 2024 à Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu, alors qu’ils voulaient voler dans une boutique de vente des téléphones au quartier Majengo, dans la commune de Karisimbi », précise le média Actu7.cd
Bref, rien dans les témoignages et les articles disponibles relatifs à l’incident ne va dans le sens d’un lynchage motivé par la haine anti Tutsi.
Conclusion
Après vérification, des images utilisées dans l’information faisant l'objet de cette vérification n’ont aucun rapport avec un lynchage des Tutsi ou même motivé par la haine anti anti Tutsi. Grâce au démenti d’un acteur de la société civile de Goma contacté par Eleza fact, de la déclaration d’un témoin rencontré sur le lieu du drame et des recherches sur Google search, il est constaté qu’aucun Tutsi n’a été brûlé puis mangé par la population de suite de la morphologie ou du fascié.
Dans le contexte actuel lié au conflit armé à l’Est de la RDC, la diffusion des informations vérifiées est largement essentielle.
La propagande des fausses informations ou la manipulation de l'information peuvent avoir des conséquences dévastatrices telles que la polarisation ou des violences et risquent d’alimenter des sentiments de colère dans la communauté. Il est donc important de s’assurer de la véracité des informations avant de les partager.
Edité par Daniel Makeke