Contexte
Depuis le 1ᵉʳ septembre dernier, les écoles de la République Démocratique du Congo ont officiellement rouvert leurs portes, marquant la rentrée scolaire (archivée ici) sur l’ensemble du territoire national. Dans la foulée, une nouvelle est largement partagée sur les réseaux sociaux, notamment Facebook, annonçant la suppression de la gratuité de l’enseignement primaire dans les zones occupées par l’AFC/M23 par le président de la République Félix Tshisekedi.
Pourtant, les vérifications menées par Eleza Fact, notamment en contactant la présidence de la république, le syndicat des enseignants de Goma et en consultant des médias crédibles, attestent que ces allégations sont fausses.
L’infox
La page Facebook Grande orientale a publié, le jeudi 4 septembre dernier, une publication alléguant que le président de la République a supprimé la gratuité de l’enseignement dans les zones occupées par l’AFC/M23. Elle affirme : « Je supprime la gratuité dans toutes les zones sous contrôle de l’AFC/M23. Ces enfants sont Swahiliphones, ils vivent et soutiennent l’AFC/M23. Je ne gaspillerai rien pour eux. Ils n’ont aucun droit à mon enseignement gratuit. Qu’ils se débrouillent avec leurs libérateurs. Mon devoir est de protéger le pouvoir, pas de nourrir l’éducation de ceux qui le défient. »
Les statistiques observées mercredi 10 septembre 2025 à 19h30 de Kinshasa démontrent que ce post a cumulé 322 j’aime, 206 commentaires et trois partages.
Plusieurs internautes pensent que cette déclaration est vraie. L’un d’eux écrit en commentaire : « Quelle raisonnement vraiment. les enfants ont quel problème avec la politique,c'est eux qui ont à L'AFC/M23 de venir s'installer à L'EST,dés fois il faut raisonner avant de parler »(sans correction).
D’autres, par contre, pensent qu’elle est fausse, à l’instar de celui-ci qui déclare : « C'est vrai que je suis contre une mauvaise gouvernance, et contre toute anti-valeurs du gouvernement actuel. Mais qu'on se le dise svp! Ça ne sert à rien de créer des mensonges. Mais créer un message comme ça ?? Vous gagnez quoi dans tout ça? » (sans correction).
La gratuité n’a pas été suspendue par Tshisekedi
Pour vérifier ces allégations, Eleza Fact a contacté Tina Salama, la chargée de communication du chef de l’État, qui a précisé que cette information est fausse. « Le président ne s’est pas exprimé sur cette question », a-t-elle précisé.
Afin de vérifier la réalité sur terrain, Eleza Fact a contacté également Innoncent Bahala, secrétaire provincial de la Force Syndicale Nationale des enseignants de Goma, qui a qualifié la nouvelle qui circule sur les réseaux sociaux d'erronée. « Faux », a-t-il brièvement répondu.
Enfin, aucun média plus ou moins crédible n’a fait mention de cette déclaration.
Dans un communiqué (archivé ici) fait sur sa page Facebook le 1ᵉʳ septembre dernier à l’occasion de la rentrée scolaire, le ministère de l’EPST a tenu à signaler que plus de 29 millions d’élèves, y compris dans les zones sous occupation, ont repris le chemin de l’école à l’occasion d’une année scolaire placée sous le signe de la continuité des réformes majeures dont la gratuité de l’enseignement primaire. « Plus de 29 millions d’élèves, y compris dans les zones sous occupation, ont repris le chemin de l’école à l’occasion d’une année scolaire placée sous le signe de la continuité des réformes majeures : la gratuité de l’enseignement primaire, le renforcement de la qualité éducative, la promotion de l’égalité des chances et l’intégration des technologies pour un apprentissage plus inclusif et stimulant », peut-on lire dans ce communiqué.
Toutefois, malgré le maintient officiel de la gratuité par le gouvernement central, selon la ministre de l’Éducation nationale, Raïssa Malu (archivé ici), les autorités locales de l’AFC/M23 ont décidé, de leur côté, de fixer des frais scolaires (archivé ici) à payer par les parents à tous les niveaux scolaires.
Conclusion
La publication attribuant à Félix Tshisekedi la suppression de la gratuité de l’enseignement primaire dans les zones occupées par l’AFC/M23 est fausse. Aucun propos de ce type n’a été tenu par le président de la République, comme l’ont confirmé à Eleza Fact sa cellule de communication et le syndicat des enseignants de Goma, aucun média crédible n’en faisant mention.
En plus de véhiculer un discours de haine à caractère tribal, cette fausse déclaration peut semer la confusion au sein de la population et de décourager de centaines d’enfants de reprendre le chemin de l’école, alors que le pays traverse déjà une grave crise sécuritaire et humanitaire à l’Est. Il est toujours important de vérifier la source avant de partager.