Contexte
Le 12 septembre, trois personnes ont tragiquement perdu la vie suite à l’explosion d’une bombe, alors qu’elles cherchaient du bois près d’un camp de déplacés dans le quartier de Mugunga, situé dans la ville de Goma, province du Nord-Kivu en République Démocratique du Congo. En conséquence, plusieurs publications ont été diffusées sur les réseaux sociaux, X et Facebook, affirmant que la bombe avait été larguée par les rebelles du M23, qui visaient une base militaire à Mugunga. Cependant, après vérification auprès de plusieurs médias fiables et du rapport émis par le gouvernement provincial, il s’avère que cette information n’est pas fondée.
Accusations
Quelques heures après l’incident soit à 14h56 heure de Goma, Daniel Michombero, journaliste indépendant et spécialiste en multimédia basé en RDC, publie l’information sur son compte X, avec une image illustrative alléguant dans la légende : « RDC : une autre bombe lancée sur le quartier Mugunga a fait 3 morts ce jeudi 12 septembre, selon les témoins, la bombe a été tirée des zones occupées par le M23_RDF » . En précisant par la suite que l’information a été confirmée par le Chef du Quartier Lac Vert, Dedesi Mitima, que nous avons essayé de contacter, mais sans suite.
Le post a fait un cumul de 11,6 milles vues, 112 mentions ‘j’aime’, 39 commentaires, 26 reposts, 2 citations et 1 signet, jusqu’à ce 20 septembre à 18:02, heure de Goma.
Plusieurs internautes ayant commenté la publication croient à l’information, pendant que d’autres n’y croient pas et expriment leur regret pour ce qui est de la crédibilité du journaliste. C’est dans le cas de Ashuza Arsène qui déclare en commentaire : « Vérifier l’information avant de publier... C’est une bonne chose dans le journalisme. Sinon, ta crédibilité sera redoutable ».
Santé Ecole ajoute : « Mon frère, aucune bombe n’a été lancée par les M23/AFC, c’est un engin explosif qui vient de faire ce drame. Il faut rectifier mon frère Michombero ».
La même information est reprise sur la page Facebook Goma Fleva, qui à son tour fait un cumul de 114 mentions ‘j’aime’, 18 commentaires et 4 partages.
Le média Politico.cd reprend aussi l’information dans un article titré « Agression rwandaise : Une bombe larguée par le M23 fait 3 morts et des blessés à Goma », publié ce 12 septembre à 13:24 heure de Goma.
Une bombe de mortier 120 mm non explosée, tue trois enfants à la recherche de bois
Pour rétablir les faits, l’équipe Eleza Fact a consulté les sources fiables d’informations du gouvernement provincial du Nord-Kivu et a trouvé une vidéo du lieutenant-colonel Guillaume Njike Kaiko, porte-parole du gouverneur militaire et des Forces Armées de la République Démocratique du Congo (FARDC) au Nord-Kivu dans laquelle celui-ci fait un rapport détaillé sur l’incident précisant la cause de la mort de trois jeunes enfants à Mugunga ce 12 septembre.
Guillaume Njike Kaiko rapporte : « Les forces armées de la République Démocratique du Congo informent la population de Goma et ses environs, qu’un incident malheureux est survenu ce jeudi 12 septembre 2024 à Mugunga où une bombe de mortier 120mm non explosée, a tué trois enfants qui étaient à la recherche de bois de chauffe et qui ont tenté de la manipuler ». Nulle part dans son message, ce dernier n’affirme que la bombe a été larguée par le M23. Au contraire, celui-ci poursuit en appelant la population de Goma à faire preuve de vigilance en évitant la manipulation de tout objet métallique d’origine inconnue et signaler sa présence aux forces de Défense et de Sécurité.
Le même rapport a été retranscrit par écrit et publié sur le compte X (lien archive) du Lieutenant-colonel Guillaume Njike Kaiko.
Capture de la correspondance téléchargée par Eleza Fact à partir du compte de N'djike
Outre, le média Tazama RDC (lien archive) précise que les trois enfants à la recherche du bois de chauffage ont été attirés par un objet suspect pensant qu’il leur pourrait être utile, après l’avoir ramassé, ces derniers l’ont manipulé, chose triste, ils y ont laissé leurs vies. Il poursuit en expliquant que les organisations non gouvernementales et les groupes de défenses de droits de l’homme, comme dans le cas de Marion Ngavo, coordonnateur de la Synergie de lutte anti-mines (SYLAM), ont également réagi, demandant une intervention urgente pour sécuriser les zones affectées par les conflits armées et prévenir de futures tragédies.
Un enchaînement des dégâts frappant la population sinistrée
Le média Actualité.cd (lien archive), parlant de l’incident, revient sur le rapport de l’armée congolaise. Ce dernier chute en précisant que ce tragique incident est une suite d’un enchaînement des dégâts ayant survenu dernièrement dans différents camps des déplacés, dont le mercredi 18 septembre dans la soirée, deux jeunes ont été tués par un policier dans les camps de Lushagala et pendant que certaines cabanes des déplacés étaient en feu.
Conclusion
Rien dans le rapport de Guillaume Njike Kaiko n’affirme que la bombe ayant tué les trois enfants à Mugunga a été larguée par le M23/RDF. Au contraire, c’était une bombe de mortier 120 mm non explosée, trouvée et manipulée par ces enfants alors qu’ils étaient à la recherche du bois de chauffage et y perdirent la vie. Il est donc crucial de sensibiliser toute la population du Nord-Kivu fréquentant les zones affectées par les conflits armés à rester vigilant et surtout ne pas manipuler des objets métalliques d’origines inconnues tout en signalant leur présence aux forces de Défense et de Sécurité. D’où l’importance de cet article de vérification qui permet de clarifier l’origine de la bombe ayant tué trois enfants ce 12 septembre à Mugunga.
Edité par Daniel Makeke