Contexte
L’entrée sud de la ville de Butembo a connu une tension, depuis le 07 décembre jusqu’au 08 décembre, suite à une manifestation improvisée par le caucus de chauffeurs empruntant l’axe Butembo-Goma. Consécutivement à cette situation, des rumeurs selon lesquelles la ville commerciale est tombée entre les mains du M23 ont circulé sur le réseau social Facebook, faisant appel à plusieurs commentaires. Après avoir constaté la réalité sur place et obtenu la précision de la société civile, nous avons constaté que la ville est encore sous la responsabilité des autorités de l'État de siège.
La rumeur prend l’ampleur
« Masasi Butembo M23 déjà au centre-ville », à traduire en français: « Ca crépite à Butembo, le M23 est déjà au centre-ville », poste un « Membre anohnyme » sur le mur du groupe privé Butembo E’wetu, un total de 213 mille 400 membres. En effet, même le profil de cet auteur anonyme n’est pas accessible sûr q ue Facebook. Le nombre de mentions « j’aime » atteint 142 clics aux côtés de 108 commentaires, ce 09 décembre. Un internautconteste et mentionne (sans correction): « J’ai fait confiance à ma ville ca ne peux pas arriver ». Un autre commente quant à lui : « un infiltré dans ce groupe ». Plusieurs autres commentaires frôlent des injures sans précédent.
Les publications du genre ont aussi inondé d’autres réseaux sociaux, tels que Whatsapp. « Ici c’est Kambali », ce groupe réunissant 196 membres contient beaucoup d’autres publications dans ce sens. À 22 h 56 du 07 décembre dernier, un internaute partage une vidéo revenant sur les tensions de ce weekend. Le commentaire qui accompagne cette vidéo reprend « Butembo tombe M23 AFC ».
Capture de l’infox dans le groupe “ ici c”est à Kambali”, faite par Eleza Fact
Butembo en vie
Pour commencer, Eleza Fact s’est rendu en plein centre-ville pour constater le déroulement des activités socioéconomiques. Tout se déroule comme d’habitude. Les coups de feu qui ont été entendus le 07 et le 08 décembre derniers ne se font plus attendre ce 09. En effet, les altercations entre les conducteurs et les services de sécurité ont coûté la vie à une fille, selon les informations diffusées dans les médias locaux, tels que la Radio Elimu.
Après le tour effectué en plein centre-ville de Butembo, nous nous sommes rendus à la mairie pour nous rassurer de qui gère les affaires courantes. Sur place, le maire et tous les services relatifs à la mairie assurent leurs tâches ; dans les bureaux dans lesquels nous nous sommes rendus, les activités se déroulent normalement, l’autorité urbaine est à son bureau, son véhicule dans son garage et le drapeau de la République démocratique du Congo flotte encore devant la porte d’entrée.
A gauche : Capture de la Mairie de la ville de Butembo, avec les visiteurs venus rencontrer le maire, prise par Eleza Fact, le 09 décembre 2024. A droite : Capture des véhicules, dont celui du maire de la ville de Butembo, prise par Eleza Fact, lundi 09 décembre 2024
Dans la suite de nos recherches indépendantes, nous avons contacté le président de la société civile, pasteur Mathe Saanane pour sa version des faits. Très vite, il nous a transféré l’interview qu’il venait de réaliser dans ce sens pour expliquer aux journalistes ce qui s’est réellement passé à Butembo, le weekend.
« Il y avait des voitures qu’on avait arrêtées au niveau de Matembe, on les a escortés jusqu’ici (Butembo, Ndlr). Il semble que certains avaient des interprétations que c’était des suspects et d’autres avaient l’impression qu’on a arrêté des voitures qui se frayaient le passage... Vous connaissez le contexte de la ville, les gens voulaient arrêter les voitures pour contrôle », précise-t-il.
Tacitement, ce cadre de la société civile invite la population à barrer la route à l’ennemi. « Nous devons éviter de nous rendre justice, parce que cela peut permettre à l’ennemi de nous pénétrer. Nous devons éviter de donner la voie à l’ennemi à travers les actions qui ne sont pas coordonnées », conseille Mathe Saanane.
La présence de l’autorité urbaine à la mairie et la précision de la société civile rencontrent le contenu de la sortie médiatique du porte-parole du secteur opérationnel Sokola I, grand-nord de la province du Nord-Kivu, qui contrôle aussi Butembo. Devant la presse lundi 09 décembre dernier, le Colonel Mak Hazukay a affirmé que les voitures en partance pour la ville de Beni et qui étaient à la base des échauffourées en ville de Butembo le samedi 07 décembre 2024 transportaient certains présumés infiltrés du Mouvement du 23 mars (M23). Nombreux d’entre eux sont déjà aux arrêts.
« On a réussi à récupérer quelques personnes suspectes. Il y en a qui ont avalé leurs SIM de téléphones. D’autres portent des noms Nande mais ne savent pas parler la langue. D’autres n’ont pas été capables de donner les noms de leurs villages d’origine. Nous demandons à la population de ne pas se laisser manipuler », a-t-il conseillé.
Poursuivant notre recherche, nous avons constaté qu’aucun meeting du M23 n’a été tenu à Butembo jusqu’ici.
Verdict
Après avoir fait le constat en plein centre-ville de Butembo et visité les différents bureaux de la Mairie de Butembo où nous avons été, nous constatons que les responsables du Mouvement du 23 mars n’ont pas pris le contrôle de la ville de Butembo, tel que diffusé dans les réseaux sociaux. D’où la nécessité de se rassurer de la véracité des informations avant de les rendre virales sur les réseaux sociaux.
Visesa Louange