Contexte
Depuis quelques mois maintenant, l’épidémie de la Mpox, communément appelée la variole de singe, ou encore la monkeypox, sévit à l’est de la RDC, précisément dans les provinces du Nord et du Sud-Kivu. Une information à propos d’un supposé traitement de la Mpox a largement circulé sur les réseaux sociaux. L'auteur de cette publication prétend que se laver simplement avec de l'eau froide et les feuilles de manioc suffirait à guérir le virus, il indique également que les personnes atteintes de cette maladie n’en meurent pas.
Pour évaluer ces affirmations, nous avons pris contact avec le coordinateur médical MSF Sud-Kivu, fait des recherches sur le traitement du virus, nous avons également consulté les rapports de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) sur la Mpox et effectué des recherches complémentaires sur des plateformes sanitaires reconnues comme l’agence des Nations Unies pour la santé. Les résultats de nos recherches ont prouvé que ces affirmations sont infondées.
Contenu
« Dans mon village, nous sommes habitués au mpox, monkeypox, qui s'appelle en français variole du singe. les gens n'en meurent même pas, peut-être que les frères de satan et leurs laboratoires en ont fabriqué d'autres types et on ne souffre de cette maladie qu'une fois, jamais deux fois.
Si cela vous arrive, mère, père, soeur, jeune et plus jeune frère, réveillez-vous tous les jours tôt le matin, à 5h du matin et lavez-vous à l'eau froide et aux feuilles du sombe, jusqu'à ce que vos blessures soient guéries »(traduit de lingála), affirme Bwembia Bo Elombo Massaka sur son compte facebook générant ainsi 106 mentions j'aimes, 142 commentaires et 14 partages jusqu'à ce vendredi 23 octobre à 8h52’ heure de Goma.
En consultant les commentaires, nous constatons que plusieurs personnes ont cru à l’information et ont remercié l’auteur de la publication. C’est par exemple Jean Louis Ahubakwa qui dit : « Nous sommes très ému de votre information qui aide toute la population d'Afrique, de la RDC et de Wamba en particulier ».
Pétronille Angolata a aussi affirmé les allégations de la publication; «Oui c’est vrai ».
Angela Nyumba et Joël Kimbumba ont également remercié l’auteur de la publication.
Usage des remèdes traditionnels non prouvés
Abdel Aziz Harouna, coordonateur médical MSF Sud-Kivu , révèle qu’aucune preuve scientifique n’a révélé jusqu'à présent que se laver avec de l’eau froide et des feuilles de manioc serait efficace pour se protéger contre la Mpox.
« Aucune preuve scientifique ne prouve que l'usage des remèdes traditionnels comme du sombe suffirait pour guérir la maladie. Une fois une personne contaminée ou présentant des signes du Mpox, la meilleure chose recommandée est de se rendre à un centre le plus proche pour une prise en charge de qualité, sachant que le traitement de la maladie est gratuit », a-t-il confié à Eleza Fact .
En outre, L’ Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé (ANSM), qui est une agence française ayant pour mission principale d’évaluer les risques sanitaires présentés par les médicaments et produits de santé destinés à l'être humain, donne des détails sur les composants du vaccin Jynneos, un des vaccins utilisés en RDC pour lutter contre la Mpox.
« Une dose de 0,5 ml d’Imvanex ou de Jynneos contient le virus vivant modifié de la vaccine Ankara – Bavarian Nordic : - au minimum 5 x 107 Unités infectantes (produit sur des cellules d’embryons de poulet) - excipients : trométamol, chlorure de sodium, eau pour préparations injectables. Le trométamol (TRIS, 10 mM) rentre dans la composition de nombreux autres vaccins (Encepur, Nimenrix, Hexyon, M-M-RVAXPRO, Comirnaty etc.). Ces deux vaccins contiennent des traces résiduelles de protéines de poulet, benzonase et gentamicine », précise un document PDF de l’ANSM sur les vaccins contre le Mpox. Les feuilles de manioc ne figurent pas parmi les composants
Le MVA-BN, un autre vaccin recommandé et utilisé en RDC contre le mpox, reprend presque les mêmes composants que celui précité, mais aucune mention des feuilles de manioc non plus dans les composants, tel que le souligne cet article du ministère de la santé canadien.
Efficacité de la vaccination
L'affirmation selon laquelle la vaccination contre la Mpox n'est pas nécessaire est infondée. Les vaccins disponibles ont démontré leur efficacité pour prévenir l'infection et réduire la gravité des symptômes. Selon l'OMS, la vaccination est un moyen clé pour contrôler la propagation du virus.
«Il existe des vaccins recommandés par l’OMS contre la mpox. De nombreuses années de recherche ont conduit à la mise au point de vaccins plus récents et plus sûrs contre la variole, maladie qui a été éradiquée. L’utilisation de certains de ces vaccins contre la mpox a été approuvée dans plusieurs pays.
À l’heure actuelle, l’OMS recommande l’utilisation des vaccins MVA-BN ou LC16 », renseigne cette instance sanitaire.
Taux de mortalité
Contrairement à l'affirmation selon laquelle les personnes atteintes ne meurent pas de la Mpox, Abdel Aziz Harouna, déjà cité plus haut, indique que la Mpox peut entraîner des complications graves, et dans certains cas la mort si la personne contaminée n'est pas prise en charge.
« Actuellement le taux de mortalité est faible mais cela ne dit pas qu'il n'y a pas de décès, il y a bel et bien des décès qui sont repérés, c'est pour quoi lorsque quelqu'un présente des signes de la maladie la meilleure des choses à faire c'est de se présenter rapidement à l'hôpital pour des soins appropriés », préconise-t-il.
Selon l’agence des nations unies pour la santé, 0,1 % et 10 % des personnes infectées par la Mpox sont décédées. Bien que le taux de mortalité reste en dessous de 4%, 537 décès liés à la Mpox ont été signalés depuis le début de l’année en RDC. Ce qui veut dire que la Mpox peut conduire à la mort.
Conclusion
Les affirmations selon lesquelles l'eau froide et les feuilles de manioc pourraient guérir cette maladie ne reposent sur aucune preuve avérée. La Mpox, bien que généralement moins mortelle que d'autres maladies infectieuses, peut entraîner des complications graves et des décès, surtout en l'absence de soins appropriés, tel que l'a indiqué Abdel Aziz Harouna, cadre de la MSF. La vaccination reste un moyen essentiel pour prévenir l'infection et réduire la gravité des symptômes, tel que le recommandent l'OMS et d'autres instances sanitaires crédibles.
La propagation de cette information peut créer des confusions au sein des populations, qui ne pourront plus se rendre à l’hôpital pour des soins appropriés, De plus, elle pourra entraver les efforts visant à éradiquer cette maladie, qui est bien présente dans les communautés congolaises et qui présente des dégâts potentiels au sein de celles-ci.
Edité par Daniel Makeke